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Le cloître de Roda, un obituaire lapidaire
Par Anne Rauner
Publication en ligne le 10 janvier 2022
Table des matières
Texte intégral
1Le visiteur de la cathédrale Saint Vincent de Roda est accueilli par l’archange Michel sculpté au xiiie siècle sur le portail de l’édifice.
2Il rencontre ensuite, dans la crypte, le même archange affairé à la pesée d’une âme qui tend ses mains vers lui dans une assourdissante supplication. Le diable tente en effet désespérément de se saisir de l’âme en appuyant avec force sur le plateau de la balance le plus proche de lui. Cette scène, si fréquente dans les églises médiévales, rappelait aux fidèles leur sort à venir, mais aussi l’indispensable solidarité entre vivants et morts : les prières aidaient les défunts à obtenir leur salut. Tel était le but de la commémoration des défunts, dont la vigueur à Roda de Isábena est attestée par la présence des 233 inscriptions funéraires dans le cloître.
La commémoration des défunts et l’écrit
3Pour saisir les liens entre pratique épigraphique et salut de l’âme, il convient de replacer ces objets écrits dans le contexte de la prière pour les morts dans l’Occident médiéval. Apparue dès la fin de l’Antiquité, la commémoration liturgique collective des défunts se traduisait depuis le Haut Moyen Âge par la présence du Memento mori au canon de la messe. Les monastères bénédictins y ajoutèrent la lecture quotidienne de la liste des membres vivants et morts de leur communauté et des communautés associées lors de l’office du chapitre, après Prime. Les listes démesurément longues obligèrent rapidement à une sélection : on se contenta alors des noms des défunts les plus récents, puis de ceux dont on célébrait le jour anniversaire de la mort, tandis que la simple présence du liber memorialis sur l’autel de la salle capitulaire suffisait à garantir l’efficacité des prières pour les autres défunts. La commémoration liturgique et individualisée des défunts se diffusa massivement dans les monastères et les chapitres, en particulier les chapitres canoniaux, au tournant des xe et xie siècles. Les bienfaiteurs des communautés en bénéficièrent à leur tour, entre autres grâce à des messes votives célébrées en échange de leurs dons aux moines ou aux chanoines. Pour aider à ces célébrations apparurent les nécrologes, calendriers perpétuels hérités des martyrologes et des calendriers liturgiques, dans lesquels on inscrivait les défunts au jour de leur mort. Parallèlement, se développa peu à peu la commémoration épigraphique. Grâce à l’inscription de leur nom sur la pierre de la tombe ou des murs, les défunts bénéficiaient des prières des passants, mais aussi de toutes celles prononcées lors des offices et des messes. La combinaison de ces trois types de commémoration, la « démultiplication de la mémoire »1 ainsi produite permettaient l’accumulation des suffrages, garantie de salut rapide.
4Ces trois formes de la commémoration des défunts ont existé à Roda comme ailleurs. La règle augustinienne adoptée par les chanoines intégrait en effet des recommandations à propos de la commémoration collective. Malgré la disparition du nécrologe de la communauté, on sait que la commémoration individuelle se trouvait elle aussi au cœur des pratiques canoniales. Les nombreuses inscriptions dans le cloître, support de la commémoration épigraphique, et l’enregistrement du nom de chanoines de Roda dans le nécrologe de Pampelune en attestent. Enfin, un inventaire de la bibliothèque de Roda du xiie siècle mentionne un martyrologe aujourd’hui perdu, tandis qu’un martyrologe du xiiie siècle a été conservé2. Sans être un manuscrit de la commémoration des défunts à proprement parler, le martyrologe (ce « recueil annonçant jour par jour, en principe à leur anniversaire, les saints qu’on a coutume de célébrer dans les Églises »3) était lié au souvenir liturgique des défunts. Dès la seconde moitié du ixe siècle, les moines prirent l’habitude de rassembler la règle, le martyrologe et le nécrologe dans le livre du chapitre. Une autre pratique se répandit : celle d’inscrire le nom de certains défunts dans les marges du martyrologe, ou dans les espaces laissés vierges sous la mention du saint en prévision de l’enregistrement du nom des défunts. Dans le calendrier complétant le martyrologe de Roda (xiiie siècle) et indiquant les fêtes des saints, figure ainsi le nom de certains évêques, dont, bien sûr, celui de saint Ramon (1104-1126)4.
5L’objectif commun des trois formes de commémoration, la proximité des formulaires des calendriers nécrologiques et des inscriptions funéraires, la présence conjointe de noms dans les deux types de sources ont amené les chercheurs à penser les grands ensembles d’inscriptions funéraires à la lumière des écrits manuscrits. L’expression « obituaire lapidaire » ou « obituaire de pierre », parfois « nécrologe de pierre »5, s’est ainsi imposée dans la désignation de grandes séries de textes obituaires (c’est-à-dire sans renvoi textuel à une tombe) : à l’abbaye de Saint-Victor de Marseille, au monastère Sant Pau del Camp à Barcelone, au cloître de Saint-Bertrand-de-Comminges. Dans un premier temps, l’expression semble avoir été employée plutôt pour des énumérations d’anniversaires sur une même pierre, comme à Saint-Victor de Marseille6, ou à l’église Saint-André-le-Bas de Vienne7. Peu à peu, un sens plus large s’est cependant imposé, considérant l’espace ecclésial ou claustral comme un seul « livre de pierre » : c’est dans ce sens que l’expression a été employée pour désigner le cloître de Roda, de Sant Pau del Camp, voire de Saint-Bertrand-de-Comminges.
Roda et la question de l’obituaire lapidaire
6L’obituaire lapidaire, et plus largement les inscriptions obituaires, furent donc pensés à l’ombre des manuscrits de la commémoration liturgique des défunts. Pour signaler les liens entre les deux types d’écrits, la similitude et la complémentarité de leurs fonctions, Cécile Treffort affirme que les inscriptions « doublent et complètent » les manuscrits8. À partir du xiiie siècle, l’un et l’autre assurent la mémoire administrative de la fondation tandis que l’inscription offre une publicité permanente du nom des défunts, permet sa lecture par tous les passants autorisés à circuler dans l’espace où elle est fixée, fait de chaque individu une « pierre vivante » dans la représentation matérielle de l’Ecclesia que constitue l’espace ecclésial semé d’inscriptions9. Le manuscrit, rangé comme les autres livres liturgiques hors du temps de prière, et visible uniquement lors de l’office ou de la messe, constitue avant tout le support écrit de la parole du prêtre qui assure une publicité ponctuelle du nom. Manuscrits nécrologiques et inscriptions obituaires se caractérisent par ailleurs par une relation différente au temps qui structure les premiers alors qu’il est en apparence absent de l’organisation des secondes10. Du fait de la présence de noms identiques dans de nombreux nécrologes de parchemin et de pierre, les historiens reconstituèrent néanmoins quelques passages de nécrologes de parchemin à partir du relevé des inscriptions11. Cécile Treffort évoque ainsi l’inscription comme un « extrait ou substitut lapidaire du livre nécrologique »12, comme si le nécrologe était la source de l’information épigraphique, comme si l’inscription remplaçait un nécrologe possible - c’est d’ailleurs la position la plus communément admise13. Aucune étude approfondie n’a pourtant été réalisée sur le sujet jusqu’à présent. Deux facteurs doivent être pris en compte. D’une part, l’absence de sources explicites sur le processus de rédaction des inscriptions obituaires, en particulier pour les xie-xiiie siècles, tandis que les conditions de production des manuscrits nécrologiques à la même période sont désormais bien connues. D’autre part, il est rare que l’on ait conservé à la fois les inscriptions et le manuscrit, en dehors de quelques exemples tout à fait fragmentaires. Il semble donc que le bon sens a poussé les historiens à considérer le manuscrit comme la source de la pierre, peut-être sous l’influence d’une évidence non formulée : l’écriture sur parchemin, plus rapide que celle sur la pierre, aurait servi de modèle pour la composition de l’inscription. Il ne faut toutefois pas exclure une seconde hypothèse : la prééminence inconsciente (dans l’esprit des historiens) de la liturgie et de la parole du prêtre sur la prière du passant.
7L’analyse des grands ensembles épigraphiques, et tout particulièrement du cloître de Roda, par Antonio Durán Gudiol est représentative de cette approche des liens entre nécrologe et série d’inscriptions obituaires. Il désigne le cloître de Roda comme « nécrologe de pierre » dont le nécrologe de parchemin, aujourd’hui disparu, aurait été la source. Il justifie son interprétation par le formulaire des inscriptions indiquant la date du décès et le nom des défunts, comme la tradition voulait qu’on procédât dans les nécrologes de parchemin14. Afin de souligner le lien entre la pierre et le parchemin, il adopte d’ailleurs pour son édition de 1967 l’organisation linéaire du temps qui structure les nécrologes au détriment des logiques spatiales fondamentales dans l’analyse des sources épigraphiques. L’édition des inscriptions de la cathédrale Saint-Vincent constitue par conséquent une tentative de reconstitution du manuscrit perdu. L’auteur s’appuie par ailleurs sur le nécrologe de la cathédrale de Pampelune dans lequel figurent 197 chanoines et évêques de Roda, dont 70 bénéficièrent également d’une inscription dans le cloître, ce qu’il signale systématiquement15. L’appartenance des deux communautés à un même réseau de confraternité expliquerait la présence des clercs de Roda dans le manuscrit de Pampelune. Selon l’éditeur des inscriptions, les chanoines de Roda auraient envoyé leur nécrologe à Pampelune afin que son contenu soit copié dans le manuscrit de la cathédrale. Il semble donc établir pour postulat premier que le nécrologe est un manuscrit liturgique comme un autre, qu’il peut à ce titre circuler d’un monastère à l’autre pour être copié. Les inscriptions claustrales et les notices nécrologiques des chanoines de Roda dans le nécrologe de Pampelune auraient donc une source commune : le nécrologe disparu de Roda. C’est pourquoi il date la réalisation des inscriptions du cloître en fonction de l’envoi du nécrologe à Pampelune, c’est-à-dire entre 1219 et 123216.
8Rebecca Swanson Hernández, qui s’intéresse à la bibliothèque de Roda plus qu’au cloître, s’inscrit dans cette tradition historiographique lorsqu’elle décrit les liens entre le nécrologe et le cloître. Pour elle, les inscriptions permettent de reconstituer le nécrologe canonial : « el necrologi s’ha conservat esculpit al claustre de la catedral, custodiant la memòria dels difunts per mitjà d’un necrologi epigràfic amb 191 inscripcions. »17. Elle insiste quelques lignes plus loin en soulignant que le nécrologe est la source des inscriptions : « el manuscrit que contenia el necrologi rotense, la font per les inscripcions epigràfiques, devia de ser a la catedral abans de la projeccio del claustre sota el bisbe Gaufred de Roda i Barbastre (1136-1143) »18. Elle adopte par conséquent le point de vue d’Antonio Durán Gudiol qui fait du nécrologe de Roda la source des inscriptions et du nécrologe de Pampelune, bien qu’elle en conteste la datation. Pour elle, ce sont les relations étroites entre Pons, évêque de Roda et de Barbastro de 1097 à 1104, et Pere d’Andouque, évêque de Pampelune, qui favorisèrent l’élaboration d’une mémoire commune, tandis que Gaufred (1136-1143), le seul évêque dont le nom figure dans les inscriptions du cloître, a l’initiative de la construction épigraphique de l’espace claustral19.
9Dans son article paru en 2020, María Encarnación Martín López s’appuie avant tout sur les travaux d’Antonio Durán Gudiol, sur ses observations du cloître, mais aussi sur le contexte épigraphique général du xiiie siècle : c’est le moment où moines et chanoines transfèrent sur la pierre les notices des obituaires dans un but liturgique et juridique de confirmation des engagements, et elle y voit la confirmation du lien entre le début des travaux épigraphiques à Roda et l’inscription des chanoines dans le nécrologe pamplonais. Le but liturgique qu’elle assigne aux inscriptions de Roda confirme par ailleurs l’appellation de nécrologe, et l’antériorité de ce dernier sur l’obituaire de Pampelune. Elle valide également un début de rédaction des inscriptions dans le premier quart du xiiie siècle. En s’appuyant sur la date de certains décès, elle établit que le nécrologe de Roda (disparu, il faut le rappeler), support des opérations de rédaction dans le cloître, a été rédigé entre 1194 et 1334. La réalisation des inscriptions se serait d’abord faite à un rythme proche de l’inscription dans le nécrologe, malgré un léger décalage ; puis à mesure que les décennies se succèdent, avec un décalage de plus en plus grand entre l’enregistrement sur le parchemin et l’enregistrement dans la pierre20.
10Que retenir de ce rapide bilan historiographique ? Tout d’abord, une évidence et une frustration. L’évidence, celle du constat d’un lien entre l’écriture des mentions obituaires sous forme épigraphique et la rédaction des obituaires et des nécrologes ; la frustration, ensuite : celle de la difficulté à qualifier ce lien dans la chronologie, son intention, sa fonction et ses effets. Cette connexion montre certes l’imbrication des différentes formes de commémoration et les liens forts entre manuscrits et épigraphie, mais l’état de la documentation laisse planer bien des interrogations. Pour Roda, aucune source n’atteste en effet clairement du fait que le nécrologe est bien la source des inscriptions obituaires ; la seule ressemblance des formulaires est-elle une preuve suffisante ? Comment garantir que les formules employées étaient bien identiques dans le nécrologe original de Roda ? D’autre part, la datation des inscriptions du cloître repose en grande partie sur celle du nécrologe de Roda et du nécrologe de Pampelune. Le premier a disparu et il paraît illusoire d’en proposer une datation, d’autant qu’on renouvelait ce manuscrit à intervalles réguliers, surtout à partir du xiie siècle, et que lors de ces renouvellements, certains noms étaient recopiés et d’autres tombaient dans l’oubli. Comment connaître le contenu exact du nécrologe au moment de l’écriture dans le cloître, surtout pour ses contenus les plus anciens ? Quant au manuscrit pamplonais, il est rédigé dans la seconde moitié du xiiie siècle par une seule main. Cette datation par la paléographie a très certainement poussé Antonio Durán Gudiol à établir un lien entre la rédaction du nécrologe de Pampelune et la rédaction des inscriptions de Roda, qu’il date pour la plupart (celles du maître de Roda) du xiiie siècle. Rebecca Swanson Hernández, qui esquisse une approche par la circulation des livres pour saisir le transfert des noms de Roda à Pampelune, parvient à une hypothèse de datation tout autre. Néanmoins, aucune des études mentionnées ne s’est vraiment penchée sur le nécrologe de Pampelune pour comprendre précisément les modalités de sa rédaction et pour définir ses liens avec le nécrologe et surtout le cloître de Roda. C’est par conséquent à ce manuscrit qu’il faut revenir pour définir la politique commémorative des chanoines de Roda, confirmer ou infirmer une datation commune à ce calendrier nécrologique de Pampelune et aux inscriptions du cloître de Roda.
11La présence de chanoines de Roda dans le nécrologe de Pampelune atteste de l’existence de liens forts entre les deux chapitres. Antonio Durán Gudiol affirme leur appartenance à une même confraternité de prières, sans toutefois en apporter de preuves21. De tels réseaux rassemblaient des monastères et des chapitres dans tout l’Occident chrétien depuis le Haut Moyen Âge. Les confraternités de prière avaient pour but de commémorer les défunts de toutes les communautés membres afin d’assurer leur salut. Il est donc tentant de considérer que Roda et Pampelune s’étaient associés pour commémorer leurs défunts. Ceci suggère que des noms de chanoines pamplonais se trouvaient dans le nécrologe de Roda, et expliquerait le nombre important de chanoines pyrénéens inscrits dans le nécrologe pamplonais. Le contenu de ce manuscrit et plus encore sa mise en page attestent d’ailleurs de cette appartenance des deux cathédrales à une même confraternité de prières.
12Constitué de 14 folios de parchemin de format 250 x 195 mm, le nécrologe de Pampelune aurait été rédigé entre 1277 et 1286 au sein du chapitre cathédral, puis très occasionnellement annoté aux xive et xve siècles22. Appartenant probablement à un livre du chapitre ou à un autre codex liturgique, il fut réalisé avec soin, visible à la qualité de la mise en page et aux lettrines filigranées tracées à l’encre bleue et rouge. Il répond aux principales caractéristiques du nécrologe des xiie-xiiie siècles : lettres dominicales23, calendrier romain, noms des défunts. On constate toutefois l’absence des fêtes des saints et des fêtes liturgiques, soit parce qu’il était initialement précédé d’un martyrologe, soit parce qu’il remplissait une fonction rendant inutile la mention de ces fêtes. Sa singularité réside aussi dans l’organisation de l’information et dans sa mise en page. Malgré son manque d’originalité, ce choix n’est pas anodin. Le scripteur cherchait bien sûr à disposer des plus grandes surfaces d’écriture possibles pour inscrire les noms et préserver la longévité du manuscrit, comme le montre le rejet dans les interlignes du statut ou de l’origine des défunts. Toutefois, cette organisation de la page autorisait surtout à classer les défunts en différentes catégories, à créer une hiérarchie entre eux, en somme à dessiner un ordre du monde24. Le rédacteur du nécrologe de Pampelune réservait ainsi le verso des folios au calendrier et aux membres du chapitre cathédral dont le nom est surmonté d’un noster indiquant leur appartenance à la communauté. Les autres défunts, laïcs ou membres d’autres communautés religieuses, se succèdent dans une énumération non organisée au recto des folios. Il existe bien sûr quelques transgressions à cette règle qui mériteraient une étude approfondie : des membres du chapitre cathédral inscrits, quelques membres extérieurs – par exemple les rois – au verso. Mais revenons à cette deuxième page du mois rédigée au recto des folios. On y trouve des bienfaiteurs laïcs de la cathédrale pamplonaise, des membres de communautés associées dans de probables réseaux de prières, et les chanoines de Roda. Le lecteur identifie ces derniers grâce à la mention interlinéaire « Rotensis », parfois accompagnée du statut du clerc (chanoine, évêque, prêtre, prévôt, etc.)25. La distinction entre membres du chapitre de Pampelune et les autres défunts amène à affirmer l’identité spécifique du chapitre cathédral.
Une nouvelle hypothèse de circulation
13Comment les noms des membres extérieurs à la communauté de Pampelune sont-ils arrivés jusqu’à la cathédrale ? Antonio Durán Gudiol suggère dans son édition des inscriptions de Huesca que le chapitre de Roda a envoyé son propre nécrologe afin qu’il soit copié sur place. Il n’apporte aucune justification à son hypothèse et en l’état actuel des connaissances aucune source n’atteste de telles pratiques pour les nécrologes dans l’Occident médiéval26. L’homogénéité paléographique du nécrologe de Pampelune, rare dans ce type de document au xiiie siècle, l’avait probablement conforté dans cette idée. L’identification sommaire des défunts atteste néanmoins d’un décès bien antérieur à la rédaction du nécrologe. Bien sûr, on ignore la durée qui sépare le décès d’une personne et son inscription dans le calendrier ; sûrement très court pour les chanoines pamplonais, il devait être plus long (parfois quelques années) pour les membres de la confraternité les plus éloignés. C’est pourquoi le manuscrit conservé n’est qu’une copie d’un autre manuscrit, aujourd’hui disparu, dans lequel des écritures plurielles dévoilaient les différentes strates de rédaction, sans que l’on sache s’il s’agit d’une copie fidèle ou d’un renouvellement impliquant un tri des anniversaires.
14Un autre argument vient confirmer définitivement cet étalement des enregistrements. L’énumération des noms des chanoines pyrénéens révèle en effet un enregistrement sur plusieurs années, voire plusieurs décennies dans le nécrologe de la communauté alliée. Parfois, plusieurs défunts de Roda bénéficiaient de prières pamplonaises le même jour. Si le nécrologe de Roda avait été envoyé et copié à Pampelune, ces noms se suivraient les uns aux autres. Il n’en est pourtant rien. Le plus souvent, les noms de défunts d’horizons différents les séparent, ce qui laisse supposer un enregistrement discontinu des noms. On perçoit le même phénomène dans de très nombreux nécrologes ou obituaires de monastères et de chapitres, par exemple le chapitre de Saint-Émilion, pour lesquels on connaît des traités de confraternité et une circulation régulière de brefs mortuaires ou de rouleaux des morts27. L’hypothèse d’un envoi du nécrologe de Roda à Pampelune ne tient donc pas ; en revanche, la circulation entre les deux chapitres d’écrits intermédiaires tels les brefs mortuaires et les rouleaux des morts paraît plausible, voire évidente.
15À partir du viiie siècle, des monastères, puis des chapitres faisaient en effet circuler d’une église à l’autre des rouleaux mortuaires ou des brefs mortuaires afin de communiquer aux autres membres de leur confraternité de prières, mais aussi à toutes les églises du parcours le nom des défunts. Le rouleau des morts, suite de feuilles de parchemin attachées les unes aux autres et enroulées autour d’un cylindre de bois, comprenait deux parties : une lettre encyclique annonçant le décès d’un ou plusieurs moines ou chanoines (plus rarement des bienfaiteurs) et formulant une demande de prière pour leur âme, puis les tituli, c’est-à-dire les accusés de réception apposés par les établissements visités. Confié à des porte-rouleaux, le rotulus voyageait souvent pendant plusieurs mois et sur de longues distances avant de revenir à son point de départ. Les brefs mortuaires, petites pièces de parchemin rarement conservés, annonçaient le décès des moines ou chanoines aux seuls membres de la confraternité de prière une fois par an ou après chaque décès28. À l’arrivée du porte-rouleau ou du messager porteur du bref, la communauté visitée apposait son titulus sur le rouleau et y inscrivait parfois une demande de prières pour ses propres défunts. Elle reportait ensuite les noms apportés par le rouleau dans son propre nécrologe ou obituaire29. Aucun inventaire systématique de ce type de sources n’a encore été dressé pour la Péninsule ibérique, mais certains rouleaux des morts catalans trouvent place dans le Répertoire des rouleaux des morts de Jean Dufour parce qu’ils circulèrent dans le Sud de la France. On n’y trouve cependant nulle trace d’un bref mortuaire ou d’un rouleau parti de Roda pour inviter à commémorer les clercs de la cathédrale.
16En revanche, un rouleau des morts rédigé à l’été 1102, après le décès de l’abbé Bernard le 20 juin, quitta l’abbaye bénédictine de Ripoll pour une longue pérégrination au sud puis au nord des Pyrénées30. Les moines y notèrent le nom de l’abbé Bernard ainsi que celui d’environ 120 abbés, moines, clercs, laïcs. Le porte-rouleau se rendit tout d’abord à Roda dont le chapitre rédigea le premier titulus du rouleau31 ; il partit ensuite vers l’ouest, fit une halte à San Pedro de Jaca puis à la cathédrale de Pampelune, se rendit à Palencia et Carrión de los Condes, puis traversa les Pyrénées. Son périple le mena jusqu’à La Réole, Moissac, Saint-Pons-de-Thomières, puis Arles et le ramena à Ripoll. Le rouleau rassemblait alors 49 tituli, parfois inscrits dans le désordre, et aurait nécessité onze folios de parchemin de dimensions inconnues. Le rouleau original a disparu et seule une copie sélective réalisée par un archiviste vers 1820 nous donne une idée de son contenu. Fidèle aux usages de son époque, l’archiviste choisit en effet de ne recopier que les passages les plus marquants (poèmes versifiés entre autres), le nom des abbés, moines, chanoines les plus connus ainsi que le nom de bienfaiteurs laïcs. Sans copier tous les poèmes inscrits par certains scripteurs, il en donne systématiquement la nature. Les chanoines de Roda profitèrent du passage de ce rotulus pour inviter toutes les communautés visitées ensuite par le porte-rouleau à prier pour certains d’entre eux. Voici le texte de leur titulus tel que l’archiviste du xixe siècle l’a recopié :
Catedral de Roda. Entre sus difuntos, ponen Raimundus episcopus bone memorie, sive sui antecessores Salomon episcopus, Arnulfus episcopus, Aimericus episcopus, Odisindus epicospus et aliorum plurimorum, quorum nomina nescimus, Fulcho canonicus etc.32
17Le chapitre énumère ici les évêques qui ont marqué son histoire en commençant par Ramon Dalmau, évêque de Roda de 1077 à 1094, puis en remontant progressivement dans le temps. Ils opèrent néanmoins une sélection et rassemblent dans un groupe anonyme (« aliorum plurimorum, quorum nomina nescimus ») les évêques n’ayant exercé leurs fonctions que sur une durée relativement courte. Llop, qui avait brièvement succédé à Ramon Dalmau avant que Pons n’accède au siège épiscopal, ne figure pas dans la liste. On observe par conséquent dès le xiie siècle une (ré)écriture de la mémoire de Roda par le chapitre lui-même et la mise en lumière de certaines figures au détriment d’autres prélats. La copie de 1820 contient le nom d’un seul chanoine, les autres ayant été remplacés par un « etc. ». Il est donc impossible de déterminer le nombre exact de chanoines dans le rouleau original. L’absence de date d’anniversaire suscite elle aussi des questionnements. Les chanoines décidèrent-ils de ne pas les signaler, comme cela se faisait souvent au xiie siècle ? Furent-elles omises par l’archiviste, qui recopie en revanche celles des anniversaires de Pampelune et des autres églises du parcours33 ?
18Tous les noms enregistrés dans les tituli devaient être copiés dans le calendrier nécrologique de toutes les communautés visitées des deux côtés des Pyrénées. Les défunts de Ripoll avaient dû trouver place dans le nécrologe de Roda, comme les évêques et les clercs de la cathédrale Saint-Vincent avaient en théorie été enregistrés dans le calendrier nécrologique de toutes les églises visitées par le porte-rouleau34. Le chapitre cathédral de Pampelune avait bien respecté cet usage et il avait transféré le nom des évêques dans son nécrologe, chacun à une date différente alors que le texte du rouleau tel qu’il nous est parvenu ne les précise pas. Ce transfert ne résulte peut-être pas de l’arrivée du rouleau, mais plutôt de brefs mortuaires antérieurs précisant les dates anniversaires et détruits une fois leur mission remplie. C’est plus que probable tant le bref supposait obligation de commémorer les défunts (à la différence des rouleaux)35, d’autant que le chapitre pamplonais enregistra l’anniversaire de plusieurs successeurs de Ramon Dalmau au xiie siècle36. L’absence des deux évêques les plus anciens, Odisend et Aimeric, pose également bien des questions. Signifie-t-elle qu’il y eut négligence à Pampelune comme cela arrivait souvent37 ? Suggère-t-elle un renouvellement du nécrologe pamplonais et un tri des anniversaires entre 1102 et la seconde moitié du xiiie siècle (date supposée de la rédaction du nécrologe) ? L’état actuel des sources ne permet pas d’opter pour l’une ou l’autre des hypothèses.
La possibilité d’une nouvelle lecture
19Le nécrologe de Pampelune résulte donc, comme tous les nécrologes, d’un enregistrement progressif des noms des défunts, y compris ceux de Roda, au fil de l’arrivée de brefs mortuaires ou de rouleaux des morts en provenance du chapitre pyrénéen. Le nécrologe de Roda contenait probablement aussi l’anniversaire de clercs pamplonais. La rédaction d’un nouveau manuscrit dans la seconde moitié du xiiie siècle n’est pas liée à l’envoi du nécrologe de Roda, ni aux aménagements épigraphiques dans le cloître. Cette interprétation traditionnelle des faits repose sur une analyse paléographique bien insuffisante pour dévoiler les processus d’écriture à l’œuvre et amène à largement surestimer la place de Roda dans l’histoire de la cathédrale de Pampelune. Sur le modèle de ce qui se faisait dans tout l’Occident, les deux chapitres, membres d’une même confraternité de prières, permettaient à leurs défunts de bénéficier du maximum de suffrages possibles en assurant une commémoration individuelle. Mais le nécrologe de la cathédrale de Pampelune a été composé par la cathédrale Sainte-Marie et pour la cathédrale Sainte-Marie. Il ne fait toutefois aucun doute que le nécrologe de Roda jouait un rôle fondamental pour la commémoration des défunts dans l’église Saint-Vincent et qu’on n’y retrouvait des noms inscrits dans le rouleau des morts (ou les brefs mortuaires) ou dans le nécrologe de Pampelune. En l’absence du nécrologe de Roda, on ne peut que formuler des suppositions sur son contenu, d’autant qu’on ignore tout d’éventuels renouvellements du manuscrit, impossibles à dater faute de sources. La rédaction d’un nouveau martyrologe au xiiie siècle a-t-elle par exemple entraîné la rédaction d’un nouveau nécrologe ? Un renouvellement du nécrologe supposait-il de procéder au tri des inscriptions obituaires dans le cloître (ou d’une partie d’entre elles) ? Autant de questions sans réponse qui empêchent de s’appuyer sur le nécrologe de Pampelune pour dater les inscriptions du cloître de Roda. S’il reste fondamental de penser les inscriptions en lien avec les manuscrits de la commémoration des défunts, il faut toutefois s’émanciper des phénomènes de « source » et de « copie » pour lire la succession des étapes d’écriture dans le cloître.
Notes
1 Treffort, Cécile, « De l’inscription nécrologique à l’obituaire lapidaire : la mémoire comme signe d’appartenance à la communauté (ixe-xiiie siècle), dans Civis/Civitas. Cittadinanza politico-istituzionale e identità socio-culturale da Roma alla prima età moderna. Atti del Seminario internazionale Siena/Montepulciano, 10-13 lugio 2008, dir. Caterina Tristano, Simone Allegria, Montepulciano, 2009, p. 117-140, ici p. 123.
2 Swanson Hernández, Rebecca, Tradicions I transmissions iconogràfiques dels manuscrits de la Ribagorça entre els segles X-XII, thèse inédite, Université de Barcelone, 2 volumes, 2016, ici volume 1, p. 83, 90 et 91.
3 Dubois, Jacques, Les martyrologes du Moyen Âge latin, Turnhout, 1978, p. 13.
4 Dubois, Les martyrologes …, op. cit., p. 13-16 ; Lemaître, Jean-Loup, Mourir à Saint-Martial de Limoges : la commémoration des morts et les obituaires à Saint-Martial de Limoges du xie au xiiie siècle, Paris, 1989, p. 75-81 ; Treffort, « De l’inscription nécrologique à l’obituaire lapidaire… », op. cit., ici p. 122 ; Swanson Hernández, Tradicions…, op.cit., volume 2, p. 133-134.
5 Jusque dans les années 1970, les termes « nécrologe » et « obituaire » furent considérés comme de quasi-synonymes. Nicolas Huyghebaert puis Jean-Loup Lemaître définirent plus précisément les deux expressions. La confusion demeure pourtant dans de nombreux travaux, y compris en français. Huyghebaert, Nicolas, Les documents nécrologiques, Turnhout, 1972, p. 35 ; Lemaître, Jean-Loup, Répertoire des documents nécrologiques, vol. 1, Paris, 1980, p. 25.
6 Corpus des inscriptions de la France médiévale, vol. 14 : Alpes Maritimes, Bouches du Rhône, Var, Paris, 1989, n° 59, p. 107-110.
7 Corpus des inscriptions de la France médiévale, vol. 15 : La ville de Vienne en Dauphiné, Paris, 1990, n°66, p. 68.
8 Treffort, Cécile, « Espace ecclésial et paysage mémoriel (ixe-xiiie siècle) », Espace ecclésial et liturgique au Moyen Âge, Lyon, 2010, p. 239-252, ici p. 242.
9 Treffort, « De l’inscription nécrologique à l’obituaire lapidaire… », op. cit., ici p. 118-119 et p. 124-125 ; Debiais, Vincent, Messages de pierre. La lecture des inscriptions dans la communication médiévale (xiiie-xive siècle), Turnhout, 2009, p. 249 et p. 251-257.
10 Treffort, « De l’inscription nécrologique à l’obituaire lapidaire… », op. cit., ici p. 126. Santiago Fernández, Javier, « Oraciones por la salvación del alma. El obituario en piedra del monasterio de Sant Pau del Camp en Barcelona », Anuario de estudios medievales, 46/2 (2016), p. 939-973, ici p. 959, p. 961 et p. 963.
11 Treffort, « De l’inscription nécrologique à l’obituaire lapidaire… », op. cit., ici p. 122, p. 124 et p. 129. Cécile Treffort souligne toutefois que seuls les noms de quelques « défunts privilégiés de la communauté, dont les noms étaient visibles par tous les fidèles entrant dans l’église » (p. 129) peuvent être restitués.
12 Treffort, « Espace ecclésial… », op. cit., p. 242.
13 Durán Gudiol, Antonio « Las inscripciones medievales de la provincia de Huesca », Estudios de Edad Media de la Corona de Aragón, 1967, p. 25-28 et p. 65 ; Martín López, María Encarnación, « Las inscripciones medievales del claustro de la catedral de Roda de Isábena (Huesca). Approximación a su taller lapidario », Espacio, tiempo y forma, 33 (2020), p. 333-364, ici p. 341 ; Santiago Fernández, « Oraciones por la salvación del alma… », op. cit., ici p. 956-957.
14 Durán Gudiol, « Las inscripciones medievales… », op. cit., ici p. 25-27 ; Martín López, « Las inscripciones medievales del claustro… », op. cit., ici p. 335-336.
15 Archives de la cathédrale de Pampelune, HH 20. Éd : Ubieto Arteta, Antonio, Obituario de la Catedral de Pamplona, Pampelune, 1954.
16 Durán Gudiol, « Las inscripciones medievales… », op. cit., ici p. 26.
17 Swanson Hernández, Tradicions…, op.cit., volume 1, p. 90.
18 Ibid., p. 91.
19 Ibid., p. 39, p. 48 et p. 91.
20 Martín López, « Las inscripciones medievales del claustro… », op. cit., ici p. 338 et p. 341-342.
21 Durán Gudiol, « Las inscripciones medievales… », op. cit., ici p. 26.
22 Ubieto Arteta, Obituario de la Catedral de Pamplona, op. cit., p. 5-7.
23 Les lettres dominicales désignent les différents jours de la semaine dans les calendriers perpétuels qui, pour être utilisables pendant plusieurs années voire siècles, renoncent à l’appellation traditionnelle des jours (lundi, mardi, etc.).
24 Le Codex Guta-Sintram, réalisé par les chanoinesses de Schwartzenthann en est l’un des plus beaux exemples. Bibliothèque du Grand Séminaire de Strasbourg, ms. 37. Éd. Le Codex Guta-Sintram, éd. Béatrice Weis, 2 vol., Lucerne/Strasbourg, 1983.
25 Un seul évêque de Roda n’est pas identifié par le scripteur pamplonais par la mention « Rotensis » : Gaufred. On lit en effet dans l’obituaire « Gozfridus episcopus ». Antonio Durán Gudiol établit la correspondance avec l’évêque de Roda grâce à la comparaison systématique du nécrologe et des inscriptions claustrales.
26 Il existe quelques rares cas de nécrologes qui changent de lieu, mais cette circulation se fait toujours dans le cadre d’un déménagement de la communauté. C’est le cas, entre autres, du nécrologe de la communauté de Muri au Bas Moyen Âge. Cf. Hugener, Rainer, « Vom Necrolog zum Jahrzeitbuch. Totengedenken und Buchführung am Übergang zum Spätmittelalter », dans Bücher des Lebens. Lebendige Bücher, éd. Peter Erhart et Jakob Kurati Hüeblin, Stiftsarchiv St. Gallen 2010, p. 200-209, ici p.
27 Le livre du chapitre de Saint-Émilion, éd. Françoise Lainé, avec la collaboration de Frédéric Boutoulle et Jean-Loup Lemaitre, Paris, 2017.
28 Dufour, Jean, Recueil des rouleaux des morts (viiie siècle-vers 1536). Volume premier (viiie siècle-1180), Paris, 2005, p. viii-ix ; Dufour, Jean, « Les rouleaux des morts, notamment dans les pays germaniques (viiie-xviiie siècle) », dans Bücher des Lebens. Lebendige Bücher, éd. Peter Erhart et Jokab Kurati Hüeblin, Stiftsarchiv St. Gallen 2010, p. 200-209, ici p. 201.
29 En théorie du moins ! Les sources attestent en effet de nombreux manquements à cette obligation. Lemaître, Mourir à Saint-Martial…, op. cit., p. 328-335 et p. 361-362.
30 Dufour, Recueil des rouleaux des morts…, op. cit., n°104, p. 264-278.
31 L’édition du texte du rouleau est claire : il s’agit bien de la cathédrale de Roda. En revanche, la carte proposée en planche 4 confond la cathédrale de Roda et l’abbaye San Pere de Rodes.
32 Dufour, Recueil des rouleaux des morts…, op. cit., n°104, p. 264-278, ici p. 267.
33 Les chanoines de Pampelune composèrent un poème de 71 vers en hommage à l’abbé Bernard. Ils ajoutèrent ensuite une liste de leurs défunts pour qu’ils bénéficient eux aussi de la prière du réseau de confraternité : Orate pro fratribus nostris defunctis, pro his videlicet: idus (sic) obit Guillelmus Bego, idus martii obit Blasco, 2 kalendas (sic) Arnaldus, kalendas mai Eneco, 13 kalendas junii Lupus, 3 kalendas junii Poncius, 2 kalendas junii Fortunius, 6 kalendas junii Garssias, 2 kalendas augusti Eneca, 2 idus augusti Lupus, 4 nonas octobris Eneco, 5 idus octobris Fortunius, 15 kalendas novembris Petrus, 3 idus novembris Fortunius, 8 [kalendas] decembris Simeon, 3 kalendas decembris Bernardus, 7 idus decembris Petrus, 5 idus decembris Eneco, 19 kalendas januarii Gomizius, Godistius et Godistius. Dufour, Recueil des rouleaux des morts…, op. cit., n°104, p. 264-278, ici p. 275. Le nom de Bernard de Ripoll (« Bernardus de Ripol abbas », Archives de la cathédrale de Pampelune, HH 20, fol. 7r, p. 19 dans l’édition) ainsi que les noms de ces chanoines figurent dans le nécrologe de la cathédrale de Pampelune.
34 Pons, évêque de Roda et de Barbastro, n’est pas mentionné dans le rouleau des morts puisqu’il est encore en activité en 1102. L’enregistrement de son nom (comme celui d’un évêque de Pampelune) dans le nécrologe de la cathédrale de Saint-Pons-de-Thomières (en Haut-Languedoc) atteste toutefois de la circulation régulière de l’information nécrologique de part et d’autre des Pyrénées. Lemaître, Jean-Loup, « La commémoration des défunts à Saint-Pons-de-Thomières », La mort et l’au-delà en France méridionale (xiie-xve siècle). Cahiers de Fanjeaux, 33 (1998), p. 77-102, ici p. 89.
35 Lemaître, Mourir à Saint-Martial…, op. cit., p. 335 : « Le bref était une source d’inscription plus efficace, parce que venant de maison avec lesquelles les liens étaient solidement établis ».
36 Aucun rouleau recensé par Jean Dufour ne passe par Roda après 1102. Le hasard de la conservation des sources, mais aussi l’histoire de Roda et le déplacement du siège épiscopal jouent un rôle dans cette absence. Les réseaux de prières furent probablement aussi restructurés par l’avancée de la conquête chrétienne dans la péninsule ; il est fort probable que les communautés du Nord de l’Espagne se tournèrent progressivement vers la péninsule au détriment des liens avec les territoires d’Outre-Pyrénées.
37 Lemaître, Mourir à Saint-Martial…, op. cit., p. 334-335.
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