Il a parlé par les prophètes.
Les inscriptions présentées par les prophètes dans l’art de l’Occident médiéval

Par Françoise Gay
Publication en ligne le 11 septembre 2017

Texte intégral

1Note des éditeurs : La recherche sur les prophètes et leur citation en épigraphie médiévale, dont la revue In-Scription publie ici la première partie, est un travail de longue haleine. Son auteur a en effet repris, dans le fond et dans la forme, la thèse de doctorat de troisième cycle qu’elle a soutenue voilà près de quarante ans, et ce n’est qu’au prix d’un immense travail de réécriture que les résultats sont aujourd’hui mis à la disposition du lecteur ; tous les chercheurs savent combien il est difficile de passer de la thèse à sa publication et ils sont invités à lire les pages suivantes dans cette perspective. Les éditeurs veulent d’autre part et en préambule, exprimer leur gratitude à l’auteur pour sa générosité et pour livrer ainsi un grand nombre de ses réflexions inédites. La quantité d’informations rassemblées est telle qu’il a paru plus satisfaisant de publier ce beau texte en trois parties afin d’en faciliter la lecture. Dans cette première livraison, on trouvera donc la présentation du contexte intellectuel, artistique et épigraphique des citations prophétiques, le catalogue des œuvres analysées par l’auteur et l’inventaire des textes tracées dans la peinture murale, la sculpture ou l’orfèvrerie médiévale. Les deux prochaines livraisons donneront à lire l’exploitation historique de ces données et leur mise en perspective.

Et commençant par Moïse, et parcourant tous les prophètes, Jésus interpréta dans toutes les Écritures ce qui le concernait1.

Introduction

2Le titre de ce travail annonce un projet ambitieux : rassembler et étudier les versets bibliques présentés par les prophètes figurés du xe au xiiie siècle dans les édifices religieux ou sur les objets du culte2. Il ne constitue pourtant que l'amorce d'un cheminement complexe à travers la foi des hommes et des femmes du Moyen Âge qui oblige à remonter jusqu'aux origines du christianisme et à naviguer entre Orient et Occident. Au début des années 1970, la lecture de L’art religieux du xiie siècle en France d’Émile Mâle, la présence familière de la frise de Notre-Dame-la-Grande à Poitiers et la dynamique de recherche lancée par les instigateurs du Corpus des Inscriptions de la France médiévale au Centre d’études supérieures de civilisation médiévale à Poitiers, Edmond-René Labande et Robert Favreau, constituèrent des facteurs déterminants pour entreprendre ce cheminement qui arrive, avec cette publication, à une forme d’aboutissement, imparfait sans doute, mais dont il convient enfin de livrer les résultats3.

3Au cours de cette étude, nous évoquerons des « cycles » ou des « ensembles » prophétiques dans le domaine de l’art monumental. Les prophètes sont en effet très souvent représentés en groupes plus ou moins nombreux, ce qui pour les inscriptions pose des questions complexes, les textes juxtaposés créant potentiellement des discours plus riches que la citation isolée. Le mot « ensemble » est ici compris au sens du mot « pluriel », et est employé à partir de deux prophètes ; même réduits à leur plus simple expression, ces « ensembles » ont un intérêt historique, certaines associations pouvant être caractéristiques d’un secteur géographique par exemple. L’attention portée aux « groupes » ne signifie pas pour autant que les prophètes isolés sont négligés, même ceux qui n’ont pas toujours de phylactère ou portent des phylactères anépigraphes ; si cela les écarte de fait de notre propos, leur présence est intéressante dans certains contextes, et on constatera très vite que ces représentations isolées ne concernent que deux ou trois personnages de l’Ancien Testament.

4Les inscriptions ainsi rassemblées, identifiées, quantifiées, comparées, permettent dans un premier temps d'identifier des sources d'inspiration pour la reprise épigraphique de ces citations. En nous focalisant sur les éléments qui attirent l'attention, tels que la fréquence de la citation ou l’approximation dans la citation du verset biblique, nous essaierons de poser les questions avec un regard neuf, en faisant des incursions dans le domaine oriental, dans les siècles postérieurs à la période définie et dans le monde de la miniature. Il s’agit donc de mettre en relation une grande quantité de données complexes relevant non seulement de l’Ancien Testament, mais aussi du Nouveau Testament, de la patristique, du drame liturgique et de la liturgie4. Mais là n’est sans doute pas le cœur du sujet : celui-ci doit en effet permettre, à travers le choix des inscriptions et leurs associations, de reconnaître les points importants de la foi chrétienne tels qu’ils ont été diffusés dans l’art, ainsi que les évolutions dans les manifestations de la dévotion et de la prière.

Les prophètes dans la tradition médiévale

5La Bible chrétienne reconnaît seize livres portant le nom d’un prophète, répartis en deux ensembles : quatre « grands prophètes » et douze prophètes « mineurs ». Les prophètes répertoriés ici en raison de leurs liens avec la pratique épigraphique ne se limitent pas à la liste biblique chrétienne mais se réfèrent à la tradition médiévale qui englobe la tradition chrétienne et la tradition hébraïque. Ce regroupement permet, par exemple, de prendre en compte une œuvre d’art où David est accompagné de l’inscription : DAVID REX ET PROPHETA. Dans l’Art religieux du xiie siècle en France, Émile Mâle évoquait les prophètes de Notre-Dame-la-Grande de Poitiers, Vérone, Crémone, Ferrare, soit Abraham, Isaïe, Daniel, Balaam, Jérémie et Moïse5. Si Jérémie, Isaïe et Daniel sont bien des prophètes dans la Bible chrétienne (Daniel n’est pas un prophète pour les Juifs), Abraham et Moïse ne sont pas des prophètes, et Balaam n’appartient pas au peuple juif. Au fur et à mesure de l’analyse des cycles prophétiques, il apparaît qu’un grand nombre de personnages bibliques ont été considérés au Moyen Âge comme des prophètes, parfois à une seule occasion ou dans une seule œuvre. C’est la raison pour laquelle le nombre de prophètes répertoriés dans cette étude est infiniment plus grand que celui de la Bible.

6Les figurations et les citations concernent, c’est évident, les quatre « grands » prophètes Isaïe, Jérémie, Daniel et Ézéchiel, mais aussi Baruch, le disciple de Jérémie. On retrouve également les douze prophètes mineurs Osée, Joël, Amos, Abdias, Jonas, Michée, Nahum, Habacuc, Sophonie, Aggée, Zacharie et Malachie. Élie et Ėlisée mentionnés dans les Livres des Rois sont aussi reconnus comme des prophètes. À cette première liste s’adjoignent les personnages habituellement considérés comme des prophètes à l’époque médiévale (et parfois bien avant) : Abraham, Moïse, Balaam, David et Jean-Baptiste, auxquels s’ajoutent parfois Samuel, Tobie, Nathan, Melchisédech, Salomon, et même Job ou Adam. La Sibylle de Cumes et Virgile sont parfois évoqués. On atteint ainsi, à travers les inscriptions relevées, le nombre de 37 prophètes.

7On peut s’étonner de la présence de certains de ces personnages parmi les prophètes. Balaam par exemple était un devin réputé, appelé par Balaq, roi de Moab, submergé par l’arrivée massive des Hébreux sur son territoire lors de l’Exode6. Melchisédech, mentionné dans trois versets de la Genèse (14, 18-20), est venu offrir à Abraham du pain et du vin après sa victoire sur les quatre rois de la Mer morte. Le verset 4 du Psaume 110 qui l'évoque dans les inscriptions se réfère à la Genèse où Melchisédech est décrit comme roi et prêtre, fonctions également remplies par David. Lorsque le psaume est rédigé, les rois Macchabées cumulent aussi les deux fonctions7. Pour le Moyen Âge, la littérature patristique fait de l'offrande de Melchisédech une préfigure de l’eucharistie et certains auteurs ont vu dans l’apparition de Melchisédech celle du Fils de Dieu8. Dans la Lettre aux Hébreux, Paul nomme Melchisédech « roi de paix »9. Les Sibylles apparaissent quant à elles dans des écrits apocryphes de l’Ancien Testament, rédigés entre le iie siècle avant notre ère et le iie siècle après10 ; dix sibylles y annoncent ainsi la venue d’un dieu unique. Eusèbe de Césarée a attribué à Constantin, dans un discours à l’assemblée des fidèles, des vers dont les premières lettres forment les mots « Jésus Christ, fils du Dieu Sauveur ». Ce texte fait partie du huitième livre des Oracles sibyllins11. Augustin donne une traduction de ce texte et rappelle que Lactance cite aussi une Sibylle non identifiée12. Dans son discours, Eusèbe évoque aussi, parmi ceux qui ont anticipé la venue du Christ, le poète Virgile qui, dans sa quatrième églogue des Bucoliques, annonce la naissance d’un enfant qui apportera au monde la paix et la prospérité :

Ultima Cumaei venit jam carminis aetas ; Magnus ab integro saeclorum nascitur ordo. Jam redit et Virgo, redeunt Saturnia regna ; Jam nova et progenies caelo demittitur alto13.

8D’autres passages de Virgile sont aussi considérés par Eusèbe comme ayant annoncé le Christ14. Virgile sera donc souvent considéré comme un prophète, par Augustin en particulier, en même temps que la Sibylle de Cumes15.

La représentation des prophètes dans l’art médiéval

9Les livres prophétiques ont peu retenu l'attention des artistes médiévaux, si ce n'est pour représenter les prophètes eux-mêmes et le plus souvent les quatre « grands » prophètes Isaïe, Jérémie, Ézéchiel et Daniel16. Isaïe, Ézéchiel, Daniel et Jonas sont parfois figurés dans l'illustration d'un épisode de leurs livres, mais les prophètes sont le plus souvent représentés en file, en pied ou en buste, quelle que soit la technique artistique utilisée : la sculpture, la peinture murale, la mosaïque, l’orfèvrerie, le vitrail. La façon dont le prophète est représenté dépend à la fois du support et de l’espace dont disposent les artistes, ainsi que du contexte iconographique. Les prophètes en pied peuvent se succéder sur de vastes espaces architecturaux, comme ceux des peintures murales de Sant’Angelo in Formis logés dans les écoinçons des grandes arcades de la nef, en relation au programme iconographique situé au-dessus17. Les prophètes de Saint-Savin occupent la même place, mais sans lien avec d’autres peintures18. Les prophètes en buste de l’ambon de Klosterneubourg s’insèrent dans l’ambitieuse composition divisée en trois parties, accompagnant de leur témoignage la partie sub gratia qui évoque la vie du Christ19. Les sculptures peuvent se trouver sur des chapiteaux, des frises, des voussures ou des linteaux. Les mosaïques sont généralement murales, de même que la peinture pour la période étudiée ici. Ces représentations peuvent être isolées (on peut trouver par exemple un chapiteau représentant un prophète) ; elles peuvent aller par deux (comme sur les arcs de triomphe des absides romaines) ou constituer des séries plus ou moins importantes. La grande majorité des textes reprenant des versets prophétiques sont donc inscrits dans le cadre d’une image, et ce dans toutes les formes d’expression artistique.

10La représentation en pied est la plus courante, et le prophète porte un phylactère ou plus rarement un livre sur lequel est inscrite la citation biblique. À première vue, ces personnages sont généralement statiques et semblables. Il y a parfois une volonté de les individualiser, par la chevelure, la barbe, la moustache. Seuls les vêtements de David, Salomon et Daniel se distinguent véritablement des autres, les deux premiers montrant, comme on l’attend, des vêtements plus riches, ornés de broderies ou de pierreries qu’accompagne la couronne royale. Daniel porte le plus souvent une tunique courte et brodée ainsi que des bottes, à la mode de Babylone. Les autres prophètes sont généralement vêtus de longues tuniques et de manteaux.

11Dès que l’on examine plus attentivement la figure du prophète, on s’aperçoit pourtant que, dans de nombreux cas, l’attitude du personnage, la façon dont il porte son phylactère et la représentation des mains peuvent participer à l’élaboration du sens de l’image. Le phylactère, qui est presque toujours le support du texte, peut avoir des formes variées : droit et plus ou moins vertical, flottant au vent, en forme de S ou de demi-cercle. La façon de présenter le prophète influe sur la forme du phylactère : à deux mains, d’une seule main, par la partie enroulée ou par le long côté. Les mains peuvent tenir la banderole de façon naturelle, mais dans certains cas, celle-ci semble flotter20. Les doigts sont parfois tous apparents et l’index, beaucoup plus long que les autres, désigne souvent le phylactère ou le texte lui-même : c’est l’attitude de l’enseignement. Le prophète qui porte un phylactère et tend son index dressé signifie une communication divine21. Enfin, le prophète peut avoir les mains voilées par son vêtement pour tenir le phylactère, comme Paul recevant la Loi sur les sarcophages paléochrétiens, en signe du contact avec le sacré, signe que l'on retrouvera dans des œuvres postérieures22.

12Le prophète est parfois tourné vers un autre personnage, attitude qui peut s’expliquer par une volonté esthétique de l’artiste, par des contraintes dues au support, mais aussi parfois par la volonté de lier les textes. Certaines œuvres précieuses accordent une grande importance à la composition non seulement pour le sens mais aussi pour l’équilibre esthétique. La croix de Bury, sur laquelle les mouvements des barbes des prophètes et des phylactères participent à une composition presque baroque, particulièrement réussie, en est sans doute l’exemple le plus abouti23.

Les prophètes et leurs messages au fil des siècles

13La majorité des textes étudiés ici sont présentés par la figure à laquelle la citation est attribuée. Il convient de faire l’historique de ce type de représentation, en tenant compte également de ce que l’on trouve dans les manuscrits.

14Les premières représentations de prophètes sont très antérieures à la période concernée par cette étude. L’un des plus anciens exemples est peut-être celui des catacombes de Priscille24 : un personnage qui se tient près d’une femme portant un enfant a d’abord été identifié comme Isaïe, puis plus vraisemblablement comme Balaam. Dès le iiie siècle, les sarcophages chrétiens romains présentent des personnages de l’Ancien Testament aux côtés des évocations des Évangiles : Daniel dans la fosse aux lions, les trois jeunes Hébreux, Balaam, Jonas, Jacob, Isaïe. Au ive siècle, des représentations du sacrifice d’Isaac apparaissent. À première vue, tous ces personnages ne sont pas forcément ceux que l’on appelle généralement « prophètes », mais constatons dès à présent, à l'instar d'André Grabar, l’importance des scènes vétérotestamentaires représentées par les artistes chrétiens en association avec les épisodes du Nouveau Testament25. Selon lui, cette proportion s’explique par la survivance de la tradition juive, notamment dans les rites funéraires, mais aussi par les invocations des prières chrétiennes ou gnostiques, où l’on rappelle les prières des justes en danger avec la mention des personnages prophétiques cités ci-dessus. Tous les exemples n’étaient pas donnés à la fois, mais variaient, aussi bien dans les représentations que dans les oraisons. Dès lors, ces compositions témoignent de la volonté typologique qui présidera généralement à la représentation des prophètes et à l’utilisation de leurs textes. C’est à Saint-Vital de Ravenne que l’on observe peut-être l’une des plus anciennes œuvres complexes de ce type : la mosaïque du chœur est dominée par l’Agneau à la clef de voûte alors que sur les parois sont représentés Moïse et le buisson ardent, Abel et Melchisédech, le sacrifice d’Isaac, l’hospitalité d’Abraham, ainsi que des apôtres et des prophètes26.

15Aux vie et viie siècles, nombreuses sont les œuvres qui établissent des liens entre les deux Testaments (les Évangiles de Rabula ou la chaire de Ravenne, par exemple)27. Là encore, les prophètes sont représentés mais aucun texte ne figure sur le phylactère qu’ils montrent ; la présence du prophète est suffisante. Pourtant, des œuvres manuscrites du vie siècle annoncent ce que vont être les grands cycles typologiques des xiie et xiiie siècles : le Codex Rossanensis et le Codex Purpureus Sinopensis28. Les peintures illustrent là des épisodes des Évangiles, et chaque scène est encadrée par deux prophètes portant un phylactère où figure un passage de leur livre en relation directe avec la scène évoquée. Une page évoque par exemple la parabole du figuier stérile et Habacuc et Daniel se tiennent de chaque côté, montrant leurs phylactères avec les citations d’Habacuc 3, 17 et Daniel 4, 10-11. Plus tard, les manuscrits carolingiens et ottoniens comportent de nombreuses représentations de prophètes, mais rares sont ceux dont les phylactères portent un texte. Le plus souvent, ils restent anépigraphes ou ne comportent que quelques signes, comme sur le Codex Aureus de Saint-Emmeran29. Dans l’Évangéliaire d’Otton III, le Christ en majesté est entouré des douze prophètes mineurs dont les noms sont inscrits sur les rouleaux qu’ils portent30 ; dans ce cas, la présence des prophètes et de leur phylactère a déjà une signification typologique.

16Chronologiquement, le catalogue présenté ici commence avec le chapiteau de San Pedro de la Nave (Espagne) daté du viie siècle et représentant Daniel ; c'est la première inscription accompagnant la représentation du prophète. En revanche, la première série de prophètes portant des inscriptions est une œuvre disparue, l’autel de Saint-Victor de Xanten, dont F.X. Kraus rapporte la description31. Il aurait été réalisé vers 964-969. La première série toujours en place est celle des vitraux des fenêtres hautes de la cathédrale d’Augsbourg, réalisés vers 1063. Les séries accompagnées de textes sont particulièrement nombreuses en Occident pour la période où les ensembles décoratifs et didactiques se multiplient, c’est-à-dire aux xiie et xiiie siècles, période de construction ou de reconstruction de nombreuses églises. Des figurations de prophètes anépigraphes subsistent à ces périodes. Au xive siècle en Occident, les cycles prophétiques connaissent un nouvel essor avec des œuvres très élaborées, telles que l’Arbre de la Croix de Taddeo Gaddi au réfectoire de Santa Croce à Florence, ou l’armoire aux vases sacrés de Santa Annunziata, également à Florence32. Le thème se spécialise aussi à cette époque avec l’apparition des ensembles plus strictement organisés opposant les prophètes et les apôtres au Credo, les premiers présentant des passages de leurs livres correspondant aux phrases du Credo. Par la suite, on reconnaît, dans des œuvres fort célèbres, de nouveaux cycles prophétiques, accompagnés ou non de textes : les prophètes de la chapelle Sixtine sont les plus connus, mais il faut également citer les cycles de Sienne, Pérouse, Lorette ou celui de la nef de l’église de San Giminiano en Toscane33. Un chapitre particulier sera consacré à l’évocation de quelques-unes de ces œuvres postérieures, afin de limiter l’essentiel de notre étude à des ensembles présentant une certaine unité de conception, procédant d’une même culture visuelle et textuelle. Les prophètes sont encore représentés et cités au cours des siècles suivants, comme à la basilique du Sacré-Cœur de Paris et dans l’église du Plateau d’Assy, où une série de vitraux de Rouault représentant un Christ aux outrages, un Christ de Pitié et deux vitraux avec des fleurs accompagnées de textes d’Isaïe (53, 7)34.

Un panorama documentaire

17Le titre de ce travail n'évoque pas de limites géographiques précises mais c'est essentiellement l'Occident chrétien latin romain qui est envisagé, augmenté des terres chrétiennes de Palestine. Le monde grec ne sera évoqué que rapidement, mais il est évident qu'il y a toujours eu des échanges entre les deux mondes.

Répartition géographique

18Il faut envisager la question géographique sous deux angles : le lieu de conservation des œuvres, qui est celui adopté pour le recensement des cycles prophétiques et surtout leur lieu d’origine. La plus grande partie des œuvres a été réalisée en France, en Italie et dans le domaine germanique35. Des cycles prophétiques ou des représentations isolées se trouvent dans ces mêmes régions mais on identifie cependant quelques groupes géographiques tout à fait distincts. Les œuvres formant ces groupes sont souvent de même nature : orfèvrerie en Rhénanie, sculpture de façade dans la vallée du Pô, mosaïques en Sicile…

19On trouve en Allemagne un grand nombre d’œuvres, pratiquement toutes datées du xiie siècle. Il y a peu de prophètes sur des supports architecturaux, à l’exception des vitraux et des peintures murales (huit ensembles), mais les œuvres d’orfèvrerie sont très nombreuses. C’est de la région de Cologne que sont originaires la plus grande partie des autels, reliquaires ou même retables qui se trouvent désormais parfois bien loin de leur lieu d’origine, à Londres, Paris ou Boston. En Italie, 33 cycles prophétiques figurent sur des œuvres architecturales ou du mobilier d’église, alors que seulement deux pièces d’orfèvrerie figurent au catalogue (l’autel d’argent doré de Torcello et la « Pala d’Oro » de Venise). Les prophètes d’Italie du Nord se trouvent surtout dans la vallée du Pô et les régions proches : sculptures des façades de Crémone, Ferrare, Vérone, peintures du baptistère de Parme, mosaïques de Venise, autel de Torcello. La Sicile présente le dernier groupe d’œuvres comportant des cycles complets de prophètes, dans des édifices très proches les uns des autres, dans le nord de l’île. À Palerme, deux églises du centre de la ville comportent des séries de prophètes : l’église Sainte-Marie de l’Amiral ou de la Martorana, et la chapelle du palais des rois normands. Non loin de là, à flanc de colline, le monastère de Monreale offre à nos yeux de nombreuses figurations de prophètes. Enfin, un dernier cycle prophétique est figuré sur les mosaïques de la cathédrale de Cefalù, non loin à l’ouest de Palerme.

Techniques de réalisation et emplacement des cycles

20La localisation des inscriptions dans les édifices et la technique utilisée pour leur mise en œuvre sont essentielles pour notre étude. C’est dans le décor des églises (œuvres sculptées, peintures murales et vitraux) qu'il y a le plus grand nombre de cycles prophétiques : 60 des 99 cycles répertoriés appartiennent au décor de l’espace ecclésial, auxquels il faut ajouter les huit cycles sur le mobilier liturgique (chancels, autels). La situation des prophètes dans les églises varie en fonction de la technique artistique utilisée pour les représenter. Le nombre des prophètes que l’on souhaitait représenter a peut-être joué un rôle dans le choix de l’espace, à moins que, au contraire, on ait choisi un certain nombre de prophètes en fonction de l’espace libre. Cette contrainte n’a sans doute pas été déterminante, surtout dans le cas des programmes très élaborés. D’autre part, le choix de la technique artistique qui a permis de représenter les prophètes n’apparaît pas comme le fruit d’une réflexion mais le plus souvent comme une évidence selon l’époque, le lieu (donc, en fonction des traditions locales sur un territoire plus ou moins vaste) et selon la façon d’envisager le thème.

21Les cycles prophétiques se situent très souvent sur les parties hautes de l’édifice pour la période analysée. Les peintures du chœur de l’église San Silvestro de Tivoli semblent être la seule exception36. Ce sont les sculptures de façade qui ont attiré l’attention des chercheurs sur le thème des prophètes, en particulier la façade de Notre-Dame-la-Grande de Poitiers et les portails des églises de la plaine du Pô37. La première présente des bustes de prophètes sur une frise alors que les prophètes des façades italiennes figurent en pied sur les colonnettes qui reçoivent les voussures du porche. Les prophètes peuvent aussi être représentés sur des chapiteaux ; on peut évoquer à ce sujet les représentations isolées de Daniel dans la fosse aux lions, qu’elles comportent ou non des inscriptions38. Des séries de prophètes plus ou moins importantes figurent aussi sur des chapiteaux, en particulier dans les cloîtres de Monreale en Sicile, d’Aoste ou de Moissac39. On peut encore citer quelques pièces particulières de la statuaire, comme les œuvres d’Antelami à la façade de Fidenza et la statue de David placée désormais dans la partie haute de la nef de Plaisance, ou encore les sculptures qui encadrent la fenêtre est de cette même église40.

22Ce sont les peintures murales qui occupent les surfaces les plus vastes. Les prophètes peints figurent sur les murs des édifices ou les voûtes, comme à San Pellegrino de Bominaco, sur les coupoles, comme au baptistère de Parme, ou encore aux écoinçons des grandes arcades (Sant’Angelo in Formis et Saint-Savin-sur-Gartempe). Les mosaïques recouvrent les murs et les coupoles de la basilique San Marco de Venise, mais aussi dans des églises siciliennes : la chapelle palatine de Palerme, l’église Sainte-Marie de la Martorana de la même ville, le dôme de Monreale et celui de Cefalù41. Les coupoles semblent constituer des lieux privilégiés du décor, ce vaste espace attirant les regards vers le haut, vers le ciel. Les prophètes peuvent être répartis autour de la coupole, comme cela se faisait déjà aux coupoles des baptistères de Ravenne, ou dans les écoinçons des coupoles comme on peut le voir dans le narthex de San Marco à Venise42. Ces œuvres majeures de la mosaïque se trouvent dans les régions sous influence byzantine, à Venise et en Sicile romane. Rome présente une autre tradition de mosaïque, principalement aux absides et aux arcs triomphaux. Plusieurs œuvres répertoriées ici suivent cette tradition qui remonte aux édifices paléochrétiens et se présentent généralement de la même manière : deux prophètes, de part et d’autre de l’arc ouvrant sur le chœur, comme dans les basiliques de Saint-Clément ou Sainte-Marie au Trastevere par exemple43. Les mosaïques disparues du dôme de Capoue et de Santa Maria Nova correspondaient également à ce type d’abside44.

23Neuf ensembles de vitraux montrent des prophètes portant des inscriptions45. La fragilité du matériau explique sans doute qu’il n’en subsiste pas davantage46. Les 19 œuvres d’orfèvrerie répertoriées (métaux plus ou moins précieux, émail ou ivoire) présentent des cycles iconographiques et prophétiques importants. La position des prophètes varie en fonction de la forme et du type d'objet. Ces œuvres d’orfèvrerie, des reliquaires pour la plupart, présentent des structures architecturales et peuvent reprendre un plan basilical et la structure de ce type d’édifice, comme par exemple le reliquaire des Rois Mages ; ils peuvent être conçus selon un plan centré dominé par un dôme, comme le reliquaire de Berlin destiné au crâne de saint Grégoire de Naziance47. On peut trouver, c’est plus rare, un reliquaire en forme de tour, comme celui des martyrs de la Légion thébaine conservé à Darmstadt48. Les prophètes, dans ces œuvres, sont le plus souvent placés dans les parties basses, sous des arcades retombant sur des colonnettes, ou entre des pilastres. En ce qui concerne les autels portatifs, les prophètes figurent le plus souvent sur la plaque supérieure, comme sur l’autel Martin Le Roy au Louvre, ou sur l’autel de Mönchengladbach49. Ils sont par contre représentés sur les faces latérales de l’autel d’Eilbertus à Berlin50. L’ambon de Klosterneubourg de Nicolas de Verdun montre des bustes de prophètes dans les écoinçons des plaques émaillées trilobées ; cette place s’explique par la participation des prophètes au thème de l’œuvre et aux liens entre le thème iconographique général et les textes prophétiques51.

Une approche chiffrée de la documentation

24Les inscriptions étudiées ici ont été réalisées entre le viiie et le xiiie siècle, à l’exception du chapiteau de San Pedro de la Nave52. Le premier ensemble prophétique concerné est celui de l’autel de l’église Saint-Victor de Xanten (965-968), détruit au cours de la Révolution française53, et les dernières œuvres répertoriées sont les vitraux de la cathédrale de Clermont-Ferrand54. Notre domaine d’étude est donc très resserré dans le temps. En réalité, la fourchette chronologique est encore plus restreinte si l’on tient compte du fait que le chapiteau de San Pedro de la Nave et l’autel de Xanten sont les seules œuvres antérieures à l’an mil, et que le xie siècle n’est représenté que par les peintures murales de Nohant-Vic (qui ne comportent pas de véritable texte) et celles plus complètes et plus connues de Sant’Angelo in Formis55. Les prophètes de Sant’Angelo, associés à un cycle christologique, représentent déjà, par leurs textes, le plein épanouissement du thème. La mosaïque de l’arc triomphal de Saint-Clément de Rome fait pénétrer dans le xiie siècle, période à laquelle la plus grande partie des œuvres ont été réalisées56. Le xiiie siècle est représenté par les églises de Matrei Gurk, Hildesheim, mais aussi par les mosaïques des nefs latérales de San Marco de Venise, les ambons de Sessa Arunca et Florence, les sculptures de Plaisance, l’autel de Torcello et bien sûr les vitraux de Lyon et Clermont57. Il semble donc que le xiie siècle constitue la période où le thème né au siècle précédent s’épanouit, s’amplifie ; les œuvres du xiiie siècle sont la poursuite du thème mais n’apportent guère de nouveauté au traitement du sujet.

25Les prophètes selon la tradition médiévale ne sont pas les seuls à présenter des phylactères dans les cycles prophétiques. Le Christ, la Vierge, la Synagogue peuvent également porter un texte. Il importe donc dans un premier temps d’examiner la fréquence de représentation de chaque prophète. Le tableau 1 permet une vision globale des représentations. On constate immédiatement qu’Isaïe est de loin le plus représenté avec 75 occurrences. Ensuite, Jérémie figure 48 fois, David et Daniel 46 fois, Ézéchiel 35 fois, Osée et Salomon 28 fois, et Joël 23 fois. Les petits prophètes non mentionnés dans cette première énumération figurent entre 10 et 20 fois sur les œuvres répertoriées. Si Isaïe est le plus représenté, c’est qu’il existe très peu de cycles prophétiques où il ne figure pas, si l’on excepte bien sûr les ensembles incomplets. Certains personnages sont inclus de façon exceptionnelle, dans un but précis sans doute mais parfois difficile à établir, dans les cycles ; c’est le cas notamment d’Ézéchias et de Tobie.

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Tableau 1 : les prophètes représentés (voir l’image au format original)

26Généralement, le prophète est identifié par son nom inscrit sur le phylactère, ou grâce au texte présenté. La fréquence de représentation d’un prophète et la fréquence de ses citations ne sont pas forcément identiques. Au sein d’un ensemble prophétique, certains prophètes n’ont ni phylactère ni rouleau, ou ces derniers sont anépigraphes. Sur le reliquaire des Rois Mages à Cologne par exemple, sept prophètes sur douze n’ont d’autre inscription que leur nom ; le retable de Klosterneubourg comprend également de nombreux phylactères sans verset biblique. Une citation prophétique peut être présentée ailleurs que sur un phylactère ou un livre, comme le verset 49, 2 d’Ézéchiel qui se déroule autour de la Vierge de Dom Rupert. Des prophètes présentent parfois un texte ne provenant pas d’un écrit qui lui est habituellement attribué. Il faut aussi remarquer des cas particuliers : si Jérémie figure souvent dans des cycles, les citations de son livre sont beaucoup moins fréquentes puisque c'est généralement lui qui porte le texte de Baruch (3, 36-38) sur son phylactère58. On note aussi quelques inscriptions prophétiques non présentées par le prophète lui-même, tels les textes de Daniel sur un chapiteau de Moissac. Il existe aussi des erreurs d’attribution ou des échanges de textes entre deux prophètes59. La représentation de tel ou tel personnage de l’Ancien Testament n’entraîne pas systématiquement l’inscription de la citation tirée d’un livre précis : une grande variété de versets peut être attribuée à Moïse, Abraham ou Salomon. Moïse peut présenter non seulement un texte de l’Exode mais aussi de la Genèse, comme sur le reliquaire des Rois Mages, et souvent un verset du Deutéronome. Un texte de ce même livre est parfois attribué à la Synagogue. Certains livres sont cités sur les phylactères des personnages dont ils rapportent la vie : Samuel ou Nathan pour les Livres de Samuel ; Élie, Élisée ou Ézéchias pour les Livres des Rois. David présente bien sûr les citations des Psaumes, sauf le verset 110, 4, toujours attribué à Melchisédech. Des versets du Livre de la Sagesse, des Proverbes ou du Cantique des Cantiques peuvent figurer sur le phylactère de Salomon. Sur quelques œuvres, deux versets bibliques de livres différents ont été repris pour le même personnage (broderie de Constance, croix de Bury…). Enfin tous les textes inscrits sur les phylactères ou les livres des prophètes ne sont pas forcément des citations précises. Certaines inscriptions font allusion à un verset ou à un texte plus important, d’autres comportent des différences par rapport aux versions courantes de la Bible60.

27Pour exposer de façon lisible et analyser les données collectées pour les citations de la Bible dans les inscriptions, un certain nombre d’informations sont organisées dans deux tableaux : le premier (tableau 2) indique la répartition des versets répertoriés pour chaque livre biblique, et le second (tableau 3) fait le relevé de tous les livres bibliques dans lesquels ont été puisés des textes, puis le nombre total de citations relevées pour chaque livre ; enfin, pour chaque livre biblique, on a indiqué le nombre de versets figurant une seule fois dans les inscriptions et le nombre de versets utilisés plusieurs fois. Précisons ici que des différences peuvent être constatées entre le nombre de représentations d’un prophète et le nombre de citations de son livre ; en dehors des raisons invoquées plus haut, des inscriptions grecques sont encore mal déchiffrées et sans traduction pour certains ensembles.

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Tableau 2 : fréquence de citation des livre bibliques (voir l’image au format original)

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Tableau 3 : répartition des citations (voir l’image au format original)

28Une première lecture de ces tableaux fournit des chiffres intéressants. Les 580 citations bibliques proviennent de 322 versets différents, ce qui signifie que 235 citations sont des citations uniques ; 89 versets seulement ont été repris plusieurs fois et presque la moitié d’entre eux n’apparaissent que deux fois. Pour les autres citations, utilisées au moins trois fois, il faut encore sélectionner celles qui reviennent le plus souvent, afin de déceler les éléments qui ont pu influer, sciemment ou inconsciemment, sur les choix de ceux qui ont élaboré ces programmes iconographiques et épigraphiques.

29Si l’on considère les versets ou parties de versets identifiées dans les inscriptions, on constate que quinze livres bibliques ont inspiré dix versets ou plus, certains de ces livres étant à l’origine de plus de trente inscriptions. Les mêmes livres sont à l’origine des citations les plus nombreuses, car c’est essentiellement dans ces livres que les versets cités fréquemment ont été puisés. Il y a cependant quelques exceptions : Osée, dont seulement onze versets ont été repris, atteint le nombre de 26 citations et Habacuc présente 19 citations pour huit versets évoqués. Inversement, les 38 versets des Psaumes n’ont été utilisés que pour 50 inscriptions, car la plupart des phylactères utilisent des citations uniques. Le livre des Psaumes présente ainsi le plus grand nombre de citations uniques pour l’ensemble des inscriptions, suivis des livres de Jérémie, Daniel, et de la plupart des petits prophètes. Si d’autres livres bibliques sont souvent utilisés dans les inscriptions, tous les livres des prophètes eux-mêmes sont cités à plus de dix reprises. Cinq livres bibliques fournissent principalement les textes qui accompagnent les prophètes : le livre d’Isaïe (81 inscriptions), le livre des Psaumes (53 inscriptions), le livre de Jérémie (24 inscriptions), le livre de Daniel (49 inscriptions), le livre d’Ézéchiel (29 inscriptions).

30Certains textes apparaissent de façon régulière : Nombres 34, 17, Deutéronome 17, 15, Isaïe 7, 14 et 11, 1, Baruch 3, 36-38, Daniel 9, 24, Ézéchiel 44, 1 ou 2 et Zacharie 9, 9. Certains prophètes sont toujours représentés accompagnés du même passage de la Bible, alors que d’autres, au contraire, présentent toujours des textes différents : Balaam montre le même texte du livre des Nombres, à une exception près. Le texte du Deutéronome le plus cité est le verset 15 du chapitre 18. Un seul texte des Psaumes (132, 11) est souvent mentionné, alors que la plupart des autres n’apparaissent qu’une seule fois. Deux citations sont très fréquentes pour Isaïe (7, 14 et 11, 1). Un seul texte de Jérémie est cité plus de cinq fois, alors que le prophète présente sur 34 œuvres tout ou partie du texte de Baruch 3, 36-38. Seul le début du chapitre 44 d’Ézéchiel a inspiré plusieurs inscriptions alors que l’on retrouve essentiellement pour Daniel le verset 24 du chapitre 9, qu’il s’agisse du texte d’origine ou de textes dérivés. La citation d’Osée la plus fréquente est celle du verset 14 du chapitre 13. En ce qui concerne les autres petits prophètes, seuls les versets d’Aggée (2, 8) et de Zacharie (9, 9) reviennent assez souvent dans les œuvres étudiées ici.

31Pour résumer l’étude de ces tableaux de fréquence, il est évident qu’un certain nombre de citations souvent utilisées permettent d’entamer des recherches sur les raisons de ces choix : Nombres 34, 17, Deutéronome 18, 15, Psaumes 132, 11, Isaïe 7, 14 et 11, 1, Baruch 3,36, Daniel 9, 24, Osée 13, 14, Aggée 2, 8, Zacharie 9, 9. D’autres textes, moins fréquemment utilisés mais presque toujours en lien avec ces derniers sont également intéressants à plus d’un titre.

À propos de quelques citations courantes

32Lors du survol documentaire présenté en introduction, le caractère typologique des œuvres répertoriées a été évoqué. Avant d’étudier plus en détail cet aspect essentiel des choses, il convient, à partir des citations les plus fréquentes figurant dans le catalogue, d’examiner de façon plus précise dans quelles conditions les prophètes qui présentent des textes sont figurés ; c'est à partir du tableau 3 que l'on peut rapidement, pour chaque livre biblique, constater le nombre total des citations, des citations uniques et celui des citations multiples.

33Moïse est le plus souvent accompagné du texte du Deutéronome 18, 15 : Prophetam de gente tua et de fratribus tuis sicut me suscitabit tibi Dominus Deus tuus. On le retrouve en particulier dans les représentations de l’Arbre de Jessé mais aussi dans des cycles prophétiques divers, comme à Matrei ou sur les mosaïques siciliennes61.

34Balaam est pratiquement toujours accompagné du texte des Nombres 24, 17 : Orietur stella ex Jacob, et consurga virga de Israel. On constate la présence de ce personnage principalement dans des œuvres ayant trait à la naissance du Christ, comme sur la sculpture de la fenêtre est de Plaisance évoquant l’Annonciation ou sur l’Arbre de Jessé de Hildesheim, mais on trouvera aussi Balaam dans des évocations plus générales de la vie du Christ62.

35David présente toujours des textes des Psaumes, mais aucun n’est repris fréquemment. Les plus utilisés le sont dans le cadre d’évocations de la Nativité ou de la virginité de Marie (Ps. 52, 6 et 132, 11). Deux versets renvoient précisément à la Passion : Ps. 22, 17-18, que l’on retrouve sur la Croix de Bury, et Ps 86, 13 inscrit sur le vitrail de la Crucifixion de Châlons-en Champagne. David est encore représenté avec un texte des Psaumes dans le cadre d’évocations eucharistiques, sur l’ambon de Klosterneubourg, l’autel portatif de la collection Martin le Roy, et aussi dans des cycles christologiques comme celui de la broderie disparue de Constance63.

36Salomon, représenté beaucoup moins souvent que David, montre des inscriptions tirées de différents livres : Ecclésiaste, Proverbes, Livre de la Sagesse ou Cantique des Cantiques. De nombreuses citations mentionnées une seule fois sont difficiles à rattacher à un thème précis. On remarque cependant des citations correspondant au thème de l’eucharistie, sur les œuvres mentionnées pour David. Le premier verset du chapitre 2 du Cantique est cité trois fois dans des représentations de l’Arbre de Jessé et Cantique 6, 3 est repris sur plusieurs œuvres.

37Isaïe figure sur presque tous les cycles consacrés à l’annonce de la venue du Christ. Quelques citations de son livre sont reprises très souvent, surtout celles en lien direct avec la Nativité : Isaïe 7, 14, Isaïe 11, 1 et, moins souvent, Isaïe 6, 9. Ces textes figurent aussi bien dans des œuvres évoquant seulement la Nativité que dans des cycles consacrés à la vie publique du Christ. Pour les évocations de la Passion, les artistes ont repris surtout les textes du chapitre 53, versets 4, 5 et 7 : Oblatus est quia ipse voluit, et non aperiet os suum. Sicut ovis ad occisionem ducetur, et quasi agnus coram tondente se, obmutescet et non aperiet os suum.

38Jérémie est représenté dans le cadre de nombreux cycles christologiques mais rares sont les citations de ses écrits mentionnées plus de deux fois. Jérémie 11, 19 (Et ego quasi agnus mansuetus, qui portatur ad victimam) est cité quatre fois lors d’évocations de la Passion du Christ et Jérémie 21, 22 (Quia creavit Dominus novum super terram : Femina circumdabit virum) est également cité quatre fois dans le cadre de la Nativité. En revanche, plus de 25 représentations de Jérémie sont accompagnées du texte de son disciple Baruch 3, 36.

39Baruch figure très rarement dans les cycles prophétiques étudiés ; il est représenté sur le plafond de l’église Saint-Michel de Hildesheim et sur le reliquaire de la collection Hochelten avec une partie du texte cité précédemment (le verset 38)64. À Fidenza, c’est sur le livre porté par le Christ figurant au sommet de la voussure (où sont représentées les Béatitudes) que l’on trouve un autre texte de Baruch (2, 9)65. Le livre 3 de Baruch est cité très souvent mais sur des phylactères présentés par Jérémie. Les versets 36-37 et 38 figurent dans le Sermon et les Drames, mais c'est le verset 36 que Jérémie présente le plus souvent. La présence du verset 3, 36 peut être considérée comme une évocation de l'Incarnation, au même titre que Isaïe 7, 1466.

40Ézéchiel ne présente qu’une citation de sa vision, alors que le début de ce livre a inspiré de nombreuses œuvres en images. Ces textes se trouvent sur des œuvres d’orfèvrerie rhénanes, sur les peintures de la cathédrale de Gurk ainsi que celles de Saint-Nicolas de Matrei en Autriche67. Les autres citations ne se rattachent pas à un thème précis, sauf celles du début du chapitre 44, 1-2, qu’il s’agisse du texte biblique authentique ou d’une allusion à l’un des deux premiers versets : Et convertit me ad viam portae sanctuari exterioris, quae respiciebat ad orientem et erat clausa. Ingressus est per eam.

41Daniel, représenté très fréquemment dans les cycles prophétiques, peut aussi figurer seul, avec une inscription ou non, sur des voussures et des chapiteaux, comme à Ripoll ou à Saint-Porchaire de Poitiers68. Les textes les plus fréquemment inscrits sur son phylactère correspondent aux thèmes de la Nativité ou la virginité de Marie (Daniel 2, 34-35 : Videbas ita, donec abcisus est lapis de monte sine manibus). Mais le passage qui revient le plus souvent est celui de la prédiction des soixante-douze semaines (Daniel 9, 24 : et adducatur justitia sempiterna et impleatur visio et prophetia et ungatur sanctus sanctorum). Ce n’est pas cette citation exacte qui est mentionnée, sauf sur une seule inscription ; l’occasion se présentera d’en parler longuement.

42Osée est le plus souvent repris lors de l’évocation de la mort et la résurrection du Christ (Osée 3, 14 : Ero mors tua, o mors ! morsus tuus ero, inferne ! ; ou 6, 3 : Vivificabit nos post duos dies ; in die tertia suscitabit nos, et vivemus in conspectu ejus). Une autre partie de ce verset est associé à la Nativité ou à l’Arbre de Jessé : Qvasi diluculum preparatus est egressus ejus, et veniet quasi imber nobis temporaneus et serotinus terrae.

43Jonas, dont des textes figurent une vingtaine de fois dans les œuvres étudiées ici, ne présente pas de citation qui revienne fréquemment. Les trois jours passés par le prophète dans le ventre de la baleine préfigurent les trois jours de la mort du Christ : Et erat Jonas in ventre piscis tribus diebus et tribus noctis… dixit : Clamavi de tribulatione mea ad Dominum et exaudiviit me, de ventre inferi clamavi, et exaudiet vocem meam. Ces versets du chapitre 2 sont utilisés séparément dans différents cycles, comme à Saint-Savin ou Aoste69.

44Habacuc est cité dans une vingtaine d’œuvres, et la plus grande partie des citations proviennent du livre 3 (Domine, audivi auditionem tuam et timui. Domine, opus tuum, in medio annorum vivifica illud).

45Aggée est représenté et cité seize fois, mais une seule citation est fréquemment utilisée (Aggée 2, 8 : et veniet Desideratus cunctis gentibus, et implebo domum istam gloria, dicit Dominus exercituum). Ce texte est généralement employé pour des annonces précises du Christ, comme sur la coupole de l’Emmanuel à Venise ou l’Arbre de Jessé de Hildesheim70.

46Zacharie figure environ vingt fois dans notre catalogue ; trois citations se répètent plusieurs fois, dont Zacharie 9, 9 (Ecce rex tuus veniet tibi justus et salvator ; ipse pauper, et ascendens super asinam et super pullum filium asinae) utilisée dans des cycles christologiques (Sant’Angelo in Formis) ou des annonces de la Nativité (Vérone)71.

47Malachie présente essentiellement les versets 3, 1-2 de son livre, parfois en entier, parfois seulement une partie du verset 1 : Ecce ego mitto angelum meum, et praeparabit viam ante faciem meam. Malachie est présent dans les annonces de la Nativité et les Arbres de Jessé.

48Cette rapide présentation des versets bibliques souvent présentés par chacun prophète permet de les distinguer de l'importante masse de citations relevées et d'avoir parfois un petit aperçu de la raison de leur choix.

Notes

1 Lc 24, 27.

2 Annonçons de suite qu’aussi essentielle soit-elle, ce n’est pas la question des relations texte/image qui se trouve au cœur de cette recherche. Elle a largement été étudiée depuis le colloque de Poitiers en 1995 (Robert Favreau (dir.), Épigraphie et iconographie. Actes du colloque tenu à Poitiers, Poitiers, CESCM, 1996), et analysée de façon nouvelle et approfondie dans l'ouvrage récent de Vincent Debiais, La croisée des signes. L'écriture et les images médiévales (800-1200), Paris, Le Cerf, 2017.

3 La thèse de troisième cycle, réalisée sous la direction de Robert Favreau, qui a précédé cet article, a été commencée en 1972, alors qu’aucun recensement systématique des inscriptions n’avait été réalisé, et il a donc fallu répertorier le maximum de cycles prophétiques sans avoir de bases de travail précises. Des auteurs du xixe siècle tels que l’abbé Corblet, l’abbé Poquet, Marius Sépet et Julien Durand avaient certes étudié certains de ces phylactères et c’est d’ailleurs sur leur travail que se basait la réflexion d’Émile Mâle, notamment en ce qui concerne le thème de l’Arbre de Jessé ou les rapports entre certaines citations et les drames liturgiques (la bibliographie est citée in extenso dans les titres suivants). Ces auteurs s’étaient généralement appuyés sur quelques exemples bien connus et n’avaient pas fait d’investigations plus poussées. Le travail de doctorat a donc été produit en dépouillant les livres d’art, en suivant les pistes découvertes au hasard des lectures ou des visites d’églises. Le lecteur remarquera que la bibliographie comporte de nombreux livres anciens ; c’est un choix délibéré : il s’agit de donner à lire les conditions dans lesquelles le travail de recherche initial a été mené. Cette bibliographie pourrait être complétée avec des études plus récentes, même si force est de constater que seuls des auteurs de la fin du xixe siècle et du début du xxe ont décrit de façon exhaustive des édifices ou des œuvres d'art en incluant systématiquement le relevé des inscriptions dans leur développement. La soutenance de cette thèse de troisième cycle n'a pas marqué la fin de la recherche, malgré de longues périodes d'activité réduite pour des raisons familiales et professionnelles. Ce n'est qu'au moment de la retraite que le dossier a finalement pu être repris et synthétisé avec le soutien de Vincent Debiais. C’est donc un bilan (provisoire) qui est livré aujourd’hui aux lecteurs dans l’attente de nouvelles recherches sur l’un ou l’autre des aspects évoqués dans ce travail.

4 Dans le domaine de la patristique, les recherches ont été menées à l'aide des index de la Patrologie Latine, des premiers volumes de Biblia Patristica et des bibliographies des ouvrages de Bernhard Blumenkranz, Juifs et chrétiens dans le monde occidental, 430-1096, Paris et La Haye, éd. Mouton et Cie, 1960 ; Gilbert Dahan, L'exégèse chrétienne de la Bible en Occident médiéval, Le Cerf, Paris 1999. Jean Michaud, ingénieur de recherche au CNRS et responsable alors du Corpus des inscriptions de la France médiévale, nous a apporté une aide précieuse au dépouillement des textes patristiques cours des années 1980 ; il est important pour moi de saluer aujourd’hui sa mémoire.

5 Émile Mâle, L'Art religieux du xiie siècle en France, Paris, 1922 ; réédition Paris, Armand Colin, 1966, p. 139-147.

6 Nombres 22.

7 Lucien-Jean Bord, Melchisédech, Paris, Geuthner, 2013, p. 35-48. Selon l’introduction d’André Paul, Qumrân et les Esséniens, Paris, Le Cerf, 2008, Melchisédech possède une grande importance dans les écrits de Qumrân où il représente une des trois figures célestes.

8 Voir les commentaires de la Bible de Jérusalem, Paris, Le Cerf, 1974, p. 44, note b.

9 Hébreux 7, 2.

10 Oracles Sibyllins, dans La Bible, Écrits intertestamentaires, sous la direction d’André Dupont-Sommer et Marc Philonenko, Paris, Gallimard, 1987, p.1035-1140. Cette publication comprend les textes des oracles I à V, soit les oracles juifs. Oracles Sibyllins, dans Écrits apocryphes chrétiens, II, sous la direction de Pierre Geoltrain et Jean-Daniel Kaestli, Paris, Gallimard, 2005, p. 1045-1097 (oracles VI à VIII).

11 Eusèbe, Oratio ad Sanctorum Coetum, PL 8, col. 401-178. Oracles Sibyllins dans Écrits apocryphes, p. 1071 et sq.

12 Augustin, La Cité de Dieu, éd. Bernard Dombart et Alphonse Kalb, intr. Gustave Bardy, trad. fr. Gustave Combès, Paris, Desclée de Brouwer, 1960 (Bibliothèque augustinienne, 36), livre XVIII, p. 552. Traduction dans La Cité de Dieu, éd. Lucien de Jerphanion, Paris, Gallimard, 2000, p. 790-791. De nombreux textes patristiques citent la (ou les) sybille(s) ; Robert Favreau les énumère dans la réédition du premier volume du Corpus des Inscriptions de la France médiévale et dans un article des Cahiers de Civilisation Médiévale (« Les peintures murales du rond-point de Notre-Dame-la-Grande de Poitiers : un programme iconographique et épigraphique très élaboré », CCM 238, 2017, p. 139-154) dans le cadre de la découverte de nouveaux textes prophétiques au rond-point du chœur de Notre-Dame-la-Grande à Poitiers.

13 Virgile, Les Bucoliques, texte et traduction de Eugène de Saint-Denis, Paris, Les Belles-Lettres, 1970, p. 59 : « Le voici venu, le dernier âge prédit par la prophétie de Cumes la grande série des siècles recommence. Voici que revient aussi la Vierge, que revient le règne de Saturne ; voici qu’une nouvelle génération descend des hauteurs du ciel ».

14 Eusèbe, Oratio ad Sanctorum Coetum, PL 8, 20, col. 457 et sq. (texte attribué longtemps à Constantin).

15 Augustin, La Cité de Dieu, 10, 27 ; traduction ibid., p. 410 : « Que Virgile, en effet, ne parle pas de son propre chef, c’est ce qui ressort du vers quatrième de l’Églogue : Voici désormais venu le dernier âge prédit par la prophétie de Cumes ; la grande série des siècles recommence. Voici que revient aussi la Vierge, que revient le règne de Saturne ; voici qu’une nouvelle génération descend des hauteurs du ciel ».

16 François Garnier, « L’imagerie biblique médiévale », dans Le Moyen Âge et la Bible, dir. Pierre Riché et Guy Lobrichon, Paris, Beauchesne, 1994, p. 424.

17 Les mentions « Pays + nombre » renvoient au catalogue à la fin de cet article fournissant l’ensemble des œuvres étudiées lors de notre recherche doctorale et post doctorale ; pour Sant’Angelo in Formis par exemple, cf. Italie 27.

18 France 24.

19 Autriche 2.

20 Un long phylactère vertical aurait une portée universelle selon François Garnier, Le langage de l’image au Moyen Âge. II : Grammaire des gestes, Paris, Le Léopard d’Or, 1989, p. 234.

21 Ibid., 10.

22 Comme sur le sarcophage de Junius Bassus au Vatican par exemple. Plus tard, on retrouve les mains voilées dans les représentations de la Traditio legis ou dans les évocations de la remise des Tables de la Loi à Moïse, comme à Klosterneubourg.

23 États-Unis, 2. On trouvera la reproduction des images du Missel de Stammhein dans Elizabeth C. Teviotdale, The Stammheim Missal, Los Angeles, J. Paul Getty Museum, 2001 ; disponible en ligne https://books.google.fr/books?id=vJUnAgAAQBAJ&printsec=frontcover#v=onepage&q&f=false (consulté le 16 juillet 2017).

24 Reproduction disponible en ligne : www.rome-roma.net/photos/museodellaciviltaromana/images/immaginedellamadonna_catacombepriscilla_3458.jpg (consulté le 14 février 2017).

25 André Grabar, Le premier Art Chrétien, Paris, Gallimard 1966, p. 103. Il a été aussi parfois évoqué le fait qu’aux premiers temps de l’Église, il était plus facile d’utiliser la symbolique de l’Ancien Testament car les canons des textes du Nouveau Testaments ont été fixés tardivement.

26 Pour les sacrifices d’Abel et Melchisédech, voir ibid., p. 156 ; pour l’Hospitalité d’Abraham, voir ibid., p. 157 ; pour l’Agneau, voir ibid., p. 117.

27 Sur la chaire de Ravenne, l'enfance et les miracles du Christ sont illustrés, alors que la Passion est annoncée à travers la vie de Joseph.

28 Respectivement Rossano Calabro, Museo diocesano di arte sacra, ms. 1 ; BnF, ms. grec, suppl. 1286.

29 Münich, Bayerische Staatsbibliothek, ms. Clm 14000.

30 Sur l'évangéliaire d’Otton III, voir Albert Böckler, Deutsch Buchmalerei, Königstein im Taunus, Langewiesche Verlag, 1953, p. 40 ; Das Evangeliar Ottos III. Clm 4453 der Bayerischen Staatsbibliothek München. Hrsg. Von Florentine Mütherich und Karl Dachs, München, London, New York, 2001.

31 Franz-Xaver Kraus, Die Christlichen Inschriften der Rheinlande, Fribourg, 1894, p. 298.

32 Les panneaux de ces armoires sont désormais conservés au couvent San Marco de Florence.

33 Sienne, peintures de la voûte du baptistère et stalles. À Pérouse, le Pérugin a représenté un groupe de prophètes en face d’un groupe de Sibylles, en-dessous d’une figuration de Dieu le Père bénissant : http://www.collegiodelcambio.it/ (consulté le 2 février 2016).

34 Clichés dans Notre-Dame de Toutes Grâces, Assy, Éditions paroissiales, 1993, s. p. ; Anne Tobé, « Passy, plateau d’Assy. Montagne magique, l’art inspiré », Les bulletins annuels du Centre de recherche et d’étude sur l’histoire d’Assy (CREHA) 2007, p. 119 (www.academie-des-beaux-arts.fr/actualites/travaux/ ; consulté le 2 février 2016). Il faut aussi rappeler que des prophètes figurent souvent dans la décoration peinte au cours des xviie et xviiie siècles, en particulier dans les églises romaines.

35 Sont rassemblées des inscriptions du domaine germanique, d’Italie, de France, mais aussi de Pologne, d’Angleterre et d’Espagne, ainsi que des royaumes chrétiens d’Orient.

36 Italie, 29.

37 Crémone, Ferrare, Plaisance : Italie, 8, 9 et 20.

38 Nous faisons figurer ici le Daniel de Matha Marestay (France, 12) et celui de Saint-Porchaire de Poitiers (France, 19) à titre d’exemple, mais on pourrait en citer beaucoup d’autres, avec ou sans texte.

39 À Monreale il n’y a qu’un chapiteau, d’ailleurs en assez mauvais état (Italie, 13) ; à Aoste, une série importante comprend des bustes de prophètes (Italie, 2), alors qu’à Moissac il s’agit de la représentation d’épisodes du livre de Daniel, accompagnés de textes longs (France, 14).

40 On peut ajouter à cette liste les deux statues du musée Gazzola de Plaisance (Italie, 19).

41 Italie, 14, 15, 12 et 7.

42 Italie, 31.

43 Italie, 21 et 22.

44 Capoue : Italie, 4. L’abside de Santa Maria n'est connue elle aussi que par une aquarelle réalisée au milieu du xviiie siècle.

45 Liste à laquelle il faut ajouter deux fragments provenant de Saint-Denis comportant un texte, conservés au Royaume-Uni.

46 Certains ne sont d’ailleurs connus que grâce à des relevés anciens.

47 Allemagne, 7 et 2.

48 Allemagne, 10.

49 France, 16 et Allemagne, 14.

50 Allemagne, 3.

51 Autriche, 2.

52 Espagne, 5.

53 Allemagne, 15.

54 France, 5 (les vitraux sont datés de 1273).

55 France, 15 (1052-1099) et Italie, 27 (1070-1080).

56 Italie, 21 (1200).

57 Autriche, 1 et 4 ; Allemagne, 13 ; Italie, 33, 28, 11, 19, 20, 30 ; France, 11 et 5.

58 Le texte de Baruch 3, 36-38 étant cité 25 fois.

59 Sur les mosaïques de la Chapelle Palatine de Palerme, Ézéchiel présente une citation de Baruch et Jérémie une citation d’Ézéchiel.

60 Ces éléments importants seront signalés dans les notices du catalogue.

61 Cette citation figure en particulier sur des miniatures représentant des arbres de Jessé de la Bible des Capucins ou du psautier de Shaftesbury ; voir Matrei (Autriche, 4) et les mosaïques siciliennes (Italie, 7, 12, 14 et 15).

62 Italie, 20 et Allemagne, 13.

63 France, 1 ; Autriche, 2 ; France, 16 ; Allemagne 9.

64 Allemagne, 13 ; Royaume-Uni, 2.

65 Italie, 10.

66 Ursula Nilgen, dans son étude des programmes iconographiques des absides de Saint-Clément et Sainte-Marie au Trastevere, précise que les prophètes de cette dernière abside se rapportent à l'Incarnation. La présence de Baruch 3, 36, montre la même chose à Saint-Clément. Ursula Nilgen, « Textes et images dans les absides des xie-xiie siècles en Italie », Épigraphie et iconographie…, p. 161.

67 Autriche, 1 et 4.

68 Espagne, 3 et France, 19.

69 France, 24 et Italie, 2.

70 Italie, 32 et Hildesheim, 13.

71 Italie, 27 et 36.

Pour citer ce document

Par Françoise Gay, «Il a parlé par les prophètes.
Les inscriptions présentées par les prophètes dans l’art de l’Occident médiéval», In-Scription: revue en ligne d'études épigraphiques [En ligne], Deuxième livraison, Livraisons, mis à jour le : 23/10/2019, URL : https://in-scription.edel.univ-poitiers.fr:443/in-scription/index.php?id=170.